Crise politique au Niger: Ça se corse pour le Bénin
*La position de la Conférence épiscopale du Bénin
*Le parti de l’opposition « Les Démocrates » tranchent avec 19 questions au Gouvernement
*Les frontières bénino-nigériennes toujours fermées
La crise politique au Niger n’a pas fini de livrer tous ses secrets. Malgré les exigences de la Cédéao pour un retour à l’ordre constitutionnel, les choses semblent se compliquer pour le gouvernement du Bénin. Les positions sont désormais tranchées pour une intervention militaire au Niger. Dans sa lettre du 11 août 2023, la Conférence épiscopale du Bénin (CEB) a donné sa position sur la situation socio-politique du Niger à travers une déclaration. A l’en croire, la CEB compatit à la souffrance du peuple nigérien et exhorte les différents protagonistes à la résolution de la crise par la voie diplomatique. « La paix est la seule voie pour construire une société plus juste et solidaire. (…) Jamais la violence et les armes n’ont résolu les problèmes des hommes. La paix est un don de Dieu ainsi qu’une conquête humble et constante des hommes », a-t-elle souhaité avant d’inviter le Bénin à être le au sein de la Cédéao, le porte-flambeau de la voie diplomatique, du dialogue, de la tolérance, du pardon mutuel et du consensus à partir de son expérience de la Conférence des Forces Vives de la Nation.
Outre la CEB, c’est le parti de l’opposition, « Les Démocrates » qui adresse 19 questions orales avec débat au Gouvernement sur les sanctions de la Cédéao contre le Niger. Pour cette minorité au Parlement béninois, l’option du gouvernement béninois, celle d’engager des troupes armées béninoises dans le contingent de la Cédéao devant combattre la junte militaire au pouvoir au Niger viole l’article 101 de la Constitution de la République du Bénin. Aussi, le parti « Les Démocrates » a-t-il voulu savoir entre autres, les mesures immédiates mises en œuvre par le gouvernement du Bénin pour contrer la montée des prix des denrées de premières nécessités.
Enfin, les conséquences de cette crise socio-politique sont énormes. Elles pénalisent les deux Etats (Bénin et Niger) qui sont liées par des accords commerciaux. Ce qui induit des effets néfastes non seulement sur la relation diplomatique entre les deux pays, mais aussi sur l’économie de ces deux pays souverains et frères.
Ambroise ZINSOU
(Lire la déclaration de la CEB et les 19 questions du parti « Les Démocrates »)
DECLARATION DES EVEQUES DU BENIN SUR LA CRISE EN COURS AU NIGER
Voici les 19 questions orales au gouvernement
1-Quelles sont les dispositions prises par le gouvernement pour prendre l’avis du parlement par rapport à l’engagement des troupes béninoises dans le théâtre des opérations de la CEDEAO au Niger en cas de la mise en œuvre de l’option militaire brandie conformément aux dispositions de l’alinéa 1 de l’article 101 de notre constitution : « la déclaration de guerre est autorisée par l’Assemblée nationale » ?
2-Dans la perspective de cette guerre contre le peuple souverain du Niger, plusieurs pays comme la France et les États-Unis ont pris des dispositions pour l’évacuation de leurs ressortissants vivant au Niger. Quelles sont les dispositions prises par le gouvernement du Bénin pour ses ressortissants vivant au Niger ?
3-Le Bénin et le Niger étant des peuples frères, qu’est-ce qui justifie alors que le Bénin accepte d’envoyer ses troupes pour attaquer le Niger pendant que d’autres pays de la CEDEAO non limitrophes du Niger, refusent d’y participer ?
4-Quel est l’effectif des soldats béninois et l’essentiel de la logistique que le gouvernement envisagerait mettre à la disposition du contingent de la CEDEAO ? Quel est le coût prévisionnel d’une éventuelle participation du Bénin à cette opération ? Qui en paye la facture ?
5-En cas d’agression du pays frère du Niger, notre gouvernement peut-il donner l’assurance qu’aucune vie de populations civiles nigériennes ne sera touchée de même que celle de nos soldats ?
6-Qu’est-ce que le gouvernement a prévu pour chaque soldat en termes de primes, et chaque famille de soldat en cas de décès de soldats béninois sur le théâtre des opérations ?
7-Le Bénin étant un pays frontalier au Niger, quelle garantie donne le gouvernement qu’en cas de riposte de l’armée nigérienne que des victimes ne seront pas enregistrées sur le sol béninois ?
8-Le gouvernement peut-il rassurer qu’en cas de guerre avec le Niger, de potentiels djihadistes ne profiteront pas pour s’infiltrer dans notre pays comme ce fut le cas en Libye ?
9-Ne serait-il plus sage de privilégier le dialogue politique et diplomatique comme ce fut le cas au Mali, au Burkina Faso et en Guinée ?
10-N’est-il pas possible que le Bénin soit pionnier comme par le passé au sein de la CEDEAO dans la prévention des coups d’État en luttant contre les exclusions électorales, l’emprisonnement et l’envoi en exil des opposants politiques ?
11-Pourquoi la CEDEAO est-elle plus prompte à réagir contre les coups d’Etat militaires et tolère les coups d’État institutionnels comme en Côte d’Ivoire en 2020, en Guinée en 2021, au Bénin en 2019, 2020 et 2021, puis dans d’autres pays ?
12-La restauration du pouvoir du président Mohamed Bazoum est-elle plus précieuse que la vie des milliers de populations nigériennes et soldats du contingent de la CEDEAO qui pourraient en mourir ?
13-Que deviendrait le Niger après cette guerre ?
14-Les populations de l’espace CEDEAO ne font plus confiance à notre organisation qu’elles qualifient de syndicat des Chefs d’Etat. Que compte faire le Bénin pour redorer le blason de cette organisation sous régionale ?
15-A l’issue du Sommet extraordinaire de la CEDEAO, le président Patrice Talon a évoqué le dialogue comme une alternative aux coups d’Etat. A quand le dialogue inclusif tant souhaité par l’opposition béninoise ?
16-Quels sont les effets de la fermeture de nos frontières avec le Niger sur le Port Autonome de Cotonou ?
17-Quels sont les effets des sanctions déjà prises par la CEDEAO sur l’économie et sur les populations ?
18-Quelles mesures immédiates ont déjà été mises en œuvre par le gouvernement pour contrer la montée des prix des denrées de premières nécessités ?
19-Quel sort le gouvernement béninois réserve-t-il aux acteurs économiques déjà victimes des conséquences des sanctions prises par la CEDEAO (acteurs portuaires, transporteurs, opérateurs économiques, etc) ?